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    Adelmiro Ybaria
    Adelmiro Ybaria
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    Dim 29 Oct - 11:06

    Une étape mouvementée
    - Deux rrrepas et une chambrrre pourrr la nouit, je vous prrrie.

    L’aubergiste lança à Adelmiro un regard soupçonneux. Elle le fixa attentivement quelques secondes, puis l’observa des pieds à la tête sans la moindre discrétion. Elle semblait mettre en balance les traits indéniablement qiang de son client avec son accent lourd et sa tenue d’insulaire. Enfin, elle leva le visage vers Tibur, qui attendait sagement quelques pas derrière son employeur, et haussa les épaules. Les affaires de ses clients n’étaient pas les siennes. Elle sortit une clé de sous le comptoir et la tendit à Adelmiro puis désigna du menton une table au fond de la pièce, isolée dans une niche sombre. Le Naidien usa de la même éloquence pour la remercier. Cette froideur ne le vexa même pas. En territoire Qiang, les étapes se succédaient et se ressemblaient.

    De toute façon, il était trop fatigué pour parler. Les cahotements de sa voiture et le froid qui s’infiltrait autour de la portière commençait à lui peser, autant que les questionnements inhérents à ce voyage. Tibur et lui avalèrent leur soupe de poulet et leur riz en silence, ignorant superbement les regards curieux qu’on leur lançait. Adelmiro avait tenté de s’y préparer mentalement avant même de quitter Talehe mais c’était finalement la fatigue et la lassitude qui avaient eu raison de son agacement face à cet irrespect patent.

    Tibur finit son repas peu avant son employeur. Il repoussa son bol et s’en alla sans dire un mot mais Adelmiro ne fit pas le moindre geste pour le retenir. Comme tous les soirs, le garde du corps allait s’assurer que le reste de l’escorte, reléguée dans les écuries, avait ce qu’il leur fallait puis il le retrouverait dans la chambre qu’ils partageaient. Le ministre finit donc sa soupe tiède comme si rien n'avait changé.

    À l’instant où il allait quitter la table à son tour, il fut arrêté net dans son mouvement. Deux paumes venaient de s’abattre bruyamment sur le plateau de bois. Il leva les yeux : une Qiang le regardait avec un sourire un peu tordu. Elle devait avoir la trentaine et ses cheveux avait été coupés très courts – plusieurs mois plus tôt. À présent, ils tombaient en mèches grasses devant son front au teint terreux. Une saisonnière ou une mercenaire venue boire sa dernière paie, jugea le Naidien. Elle n’était pas bien grande mais la confiance en elle gonflée par les verres d’alcool qu’on sentait dans son haleine, elle profitait qu’il soit assis pour l’observer de haut, d’un regard vitreux malgré la vivacité qu’elle essayait d’y exprimer.

    - Alors, mignon, on se promène tout seul ? demanda-t-elle.

    - À trop chercher la compagnie, on ne trouve que la mauvaise, répondit Adelmiro, citant un proverbe qiang.

    Une façon polie de dire qu’il ne l’avait pas sollicitée. Il s’étonna lui-même, de réussir à faire de l’esprit malgré la fatigue qui pesait sur ses épaules. D’un autre côté, c’était plus facile d’essayer d’esquiver la conversation que de se lancer dedans. Pour faire comprendre qu’il n’avait aucune intention d’aller plus loin, il se releva et voulut s’éloigner mais la femme se décala un peu pour lui bloquer le passage.

    - Tu ne m’as pas cherchée, moi, siffla-t-elle, mi-menaçante mi-aguicheuse.

    - Je devais avoir mes raisons.

    Dans l’enceinte civilisée de la cour royale naidienne, cette réplique serait passée pour une façon polie de dire qu’il avait d’autres soucis dont il ne souhaitait pas parler, mais dans un cadre moins habitué aux louvoiements et aux sous-entendus, elle passa pour une insulte juste assez maquillée pour n’en être que plus offensante.

    - Qu’est-ce que tu veux dire par là ?!

    L’importune se redressa, bomba le torse et fit un pas en avant, repoussant Adelmiro un peu plus loin dans l’alcôve. Même s’il la surplombait de presque une tête, elle était solidement bâtie, pour une femme. Elle devait être habituée à se servir de sa présence physique pour se faire entendre. Dans ce cas, elle oubliait (ou ignorait ? L’alcool pouvait émousser son sens de l’observation) qu’elle n’avait pas affaire à un homme de son peuple, habitué à respecter les femmes comme le sexe fort. De plus, la fatigue anesthésiait la combativité mais aussi la peur qu’Adelmiro aurait pu ressentir. Même s’il commençait à se dire que Tibur prenait un peu trop son temps…

    - Je ne cherche pas la querelle, soupira-t-il. Ni la compagnie. Mon ami ne va pas tarder à revenir, nous allons monter nous coucher et demain matin, quand vous vous réveillerez, nous serons déjà partis. Nous ne sommes que des voyageurs fatigués désirant atteindre leur destination sans ennuis.

    Pendant un instant, il espéra que cette preuve de paix allait suffire à le tirer de ce mauvais pas mais tout espoir s’évanouit quand trois autres silhouettes, du même acabit que celle de l’enquiquineuse, s’approchèrent.

    - Ce minet te manque de respect, Katachi ?

    Adelmiro sentit ses épaules s’affaisser et son visage se défaire. Il était grand temps que Tibur revienne !
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    Yul La'nfan
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    Mer 1 Nov - 18:49

    Une histoire de Saké

    ft. Adel


    Dodelinant de la tête après une journée éreintante, Yul fit tournoyer sa cuillère une fois, deux fois, trois fois dans son bol de gruau, avant de se rendre compte qu’une de ses voisines de table la fixait d’un air désabusé. Elle redressa aussitôt les épaules, laissant la lumière des torches reluire sur les tatouages maculant sa peau halée, illuminer le filet de sa hallebarde posée tout près d’elle. Aussitôt, le regard dubitatif la quitta.
    Elle était arrivée à Garajin alors que déjà le soleil disparaissait à l’horizon, transie de froid et de fatigue après plusieurs jours de voyage et de bivouac. Après un rapide détour aux écuries pour déposer Eveth, elle était venue réserver une chambre et engouffrer un repas chaud, dans l’espoir de se requinquer, et de trouver la motivation pour ce voyage qui commençait cruellement à lui faire défaut.
    Un pichet fut soudain déposé sur sa table, et la mercenaire retint un sursaut, souriant plutôt au cuistot qui venait de lui apporter de quoi étancher sa soif.
    - C’est sur la maison.
    Yul jeta un coup d’œil au contenu de la poterie. Lorsque les effluves d’alcool lui parvinrent jusqu’au nez, elle masqua une grimace par un énième sourire, mais se força à décliner :
    - Je suis en mission, mentit-elle. Mais merci pour l’offre.
    Heureusement, l’excuse sembla contenter le jeune homme, et Yul put reprendre son maigre repas en paix, souhaitant de temps à autre que le cuistot lui ait, plutôt que du saké, apporté une bonne pièce de viande, pour combler son estomac qui criait famine.
    Elle avait presque terminé son repas lorsqu’une commotion, un peu plus loin dans la salle, lui fit tourner la tête. Dans l’alcôve, elle aperçut un homme Qiang, bien trop richement vêtu pour être du village, en pleine altercation avec une guerrière qui, quant à elle, n’avait sans doute pas rechigné face au saké. Le différent lui parut d’abord inoffensif, et Yul reporta son attention sur son arakh qu’elle avait commencé à polir. Mais lorsque, du coin de l’œil, elle capta les silhouettes de trois autres femmes s’approchant de l’homme, qui lui paraissait essayer de plus en plus de se fondre dans le mur derrière lui, elle se leva.
    Attrapant sa cape rouge et la déposant sur ses épaules avec un soupir las, elle se fraya un chemin parmi les tables jusqu’à pouvoir accoster les quatre autres jeunes femmes, certaines plus éméchées que d’autres, toutes semblant prêtes à en découdre avec l’homme en face d’elles. Yul n’aimait pas se mêler de ce qui ne la regardait pas, mais l’inconnu, malgré son port fier, envoyait de tels signaux de détresse qu’elle ne pouvait sciemment l’ignorer.
    - Mesdames, je pense qu’il est temps que nous allions prendre un peu l’air.
    Elle avait pris un ton enjoué, espérant pouvoir résoudre ce conflit de façon pacifique.
    La plus petite d’entre elles se retourna, et, pointant un doigt qui tanguait sous les effets de l’alcool qu’elle avait absorbé, s’adressa à elle :
    - Qu’est-ce que tu veux… toi ?
    Ses derniers mots perdirent de leur animosité, une fois les drapés rouges et les armes de Yul pris en compte. Elle resta comme hébétée durant de longues secondes. Puis, enfin, l’une des trois femmes la saisit par le coude, et la guida sur le côté, contournant Yul.
    - Vient, Takashi. Tu as trop bu, de toute façon.
    Délicatement mais fermement, Yul les accompagna jusqu’à la sortie. Ce ne fut qu’une fois que le son de leur voix s’éloigna dans l’obscurité qu’elle se permit de se retourner. La tenancière lui fit un signe de tête approbateur, ce à quoi elle répondit de même.
    Alors qu’elle regagnait sa table pour finir son repas, elle se permit de jeter un œil en direction de l’homme auquel les guerrières cherchaient des noises, et de lui adresser, à lui aussi, un hochement de tête.



    Adelmiro Ybaria
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    Mar 7 Nov - 14:01

    Une étape mouvementée

    Adelmiro n’était pas le genre d’homme à avoir peur de ses semblables. Il faut dire aussi qu’il n’avait jamais été menacé, pas aussi directement et physiquement : le monde de la cour est plus subtil que ça, et lors de ses déplacements, ses escortes veillaient toujours à sa sécurité. À quel moment Tibur et lui avaient-ils jugé qu’il était sûr de le laisser seul en pleine vue ? Le ministre se souvenait avoir discuté de ça avec son garde du corps, lors de leur première étape en territoire Qiang, et ils avaient tous les deux convenu qu’isolé dans une chambre, loin des regards, il était bien plus en danger. C’était raisonner en courtisan, et oublier que les gens qui l’entouraient à présent était bien plus habitués à la violence et susceptibles de fermer les yeux.

    Il ne comprenait pas encore son erreur mais la constatait, et de façon on-ne-peut-plus équivoque. L’éclat de voix de cette Katachi avait forcément attiré l’attention d’une bonne partie de la salle, pas seulement de ses trois amies, et pourtant, personne d’autre ne semblait s’en émouvoir. Adelmiro agrippait déjà sa tunique, pour la relever et essayer d’envoyer un coup de pied dans le ventre de la première, ne voyant d’autre issue possible à sa situation, quand une aide sembla tomber du ciel. Une femme aux cheveux blancs, à peine plus grande que l’agresseuse mais bien plus stable sur ses jambes, essayait de désamorcer la situation :

    - Mesdames, je pense qu’il est temps que nous allions prendre un peu l’air.

    Une excellente idée, de l’avis d’Adelmiro, mais les premières concernées ne semblaient pas emballées. La Katachi se retourna pour protester mais quelque chose l’arrêta au milieu de sa phrase. Le Naidien supposa que c’était la cape rouge de la nouvelle venue : il savait ce que cela signifiait et visiblement, la querelleuse aussi. Après une hésitation qui sembla durer une éternité, elle se laissa pousser vers la sortie sans plus protester et Adelmiro put enfin respirer. Le soulagement puis la compréhension de ce à quoi il venait d’échapper lui fit l’effet d’un sceau d’eau glacé. Il prit une seconde pour se remettre les idées en place, reprendre son souffle puis s’avança vers sa sauveuse, qui était retourner s’asseoir à sa place après un simple signe de la tête.

    - Merci pour votre aide, dit-il en soignant son Qiang, pour la première fois depuis le début de ce voyage. Puis-je vous offrir quelque chose, en gage de reconnaissance ?

    En même temps, il plaça sa main sur le dossier de la chaise en face de la jeune femme et demanda du regard s’il pouvait prendre place. Visiblement, Tibur avait décidé de discuter un peu avec les autres membres de l’escorte – si cela n’avait pas compromis son travail, ça aurait pu se comprendre : Adelmiro n’avait pas beaucoup de sujets de conversation susceptibles d’intéresser son garde du corps, un homme bien élevé mais qui restait un soldat avant tout, peu intéressé par la politique et les intrigues de cour. Mais en son absence, le ministre aimait autant ne plus rester seul. Cette personne ne semblait pas des plus sociables mais si elle s’était opposée à ce qu’on le maltraite une première fois, ce n’était sans doute pas pour le laisser tomber la minute suivante… pas vrai ?
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    Yul La'nfan
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    Mar 7 Nov - 22:56

    L’étranger

    ft. Adel


    Yul pensait que l’échange s’en arrêterait là. Ainsi elle se rassit, et se remit à l’ouvrage. Le fil de son arakh glissait doucement sur la pierre à polir, lancinant pour certains, apaisant pour elle. Tant et si bien qu’il ne lui fallut que quelques secondes pour pénétrer dans un état similaire à une trance alors qu’elle travaillait. Malheureusement, elle fut presque aussitôt interrompue par l’inconnu.
    - Merci pour votre aide. Puis-je vous offrir quelque chose, en gage de reconnaissance ?
    Yul fut surprise de déceler un accent au sein de ses paroles. Elle soupçonnait qu’il n’était pas de la région, mais sa manière de former les sons ressemblait bien plus à de l’Ivrian, et elle fronça les sourcils, intriguée par cette information.
    Il avait placé sa main sur le dossier de la chaise d’en face en un geste interrogateur, et Yul hésita. Elle avait prévu de ne pas s’attarder, une simple nuit à l’auberge pour se reposer et se ressourcer, et elle serait de retour sur les routes. Elle pensait même aller se coucher dès qu’elle en aurait fini avec l’entretien de son matériel. Mais en attendant, la compagnie lui serait-elle délétère ?
    Elle se permit de jauger un peu plus l’inconnu qui se présentait à elle. Il n’était pas bien plus grand qu’elle, une dizaine de centimètres tout au plus, mais elle ne pouvait qu’approuver son port de tête haut et sa posture droite. Tandis que la sienne venait d’années d’entraînement dans un camp militaire, elle soupçonnait que cet homme ait été façonné par des duels bien différents. Il était trop épinglé, trop sophistiqué, trop fin et sec pour former un bon soldat, mais trop maniéré pour être un simple manant.
    Satisfaite de son inspection, elle en conclut que cet homme ne serait pas un danger pour elle, et qu’elle ne s’ennuierait pas plus seule à sa table qu’en conversant un peu avec lui. Elle hocha ainsi la tête en guise de réponse à sa question muette, et l’observa s’installer avant de reprendre ses activités.
    Elle venait de passer quelques secondes de plus à soigner sa lame lorsqu’elle se rendit compte de la grossièreté de son comportement, d’autant plus si, comme elle le pensait, cet homme était un nobliau. Mal à l’aise, elle se stoppa en plein mouvement, releva les yeux vers son vis-à-vis, et, après quelques délibérations internes, lui adressa enfin la parole :
    - Veuillez me pardonner. Je ne suis pas la meilleure compagnie qui soit.
    Puis, se rappelant qu’il lui avait plus tôt posé une question :
    - Je n’ai besoin de rien, et mon geste était purement désintéressé, ne vous en faites pas. Je me nomme Yul. Mercenaire. Enchantée de faire votre connaissance.
    Et elle lui tendit la main qui n’était pas pour le moment fermement enroulée autour de la garde de son arakh.  



    Adelmiro Ybaria
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    Sam 11 Nov - 21:14

    Une étape mouvementée

    L’étrangère sembla l’étudier un moment avant de lui répondre. Son regard le parcourut de haut en bas, s’attardant un peu plus sur son visage. Il ne s’offusqua pas : c’était logique. En tant que mercenaire, elle devait être habituée à la prudence, pour ne pas dire à la méfiance, et on n’invite pas n’importe qui à s’asseoir aussi près de soi. Il se laissa donc observer de bonne grâce jusqu’à ce qu’elle lui donne son autorisation d’un signe de tête. Il la remercia de la même façon avant de tirer la chaise pour s’y asseoir.

    Face à lui, la jeune femme aiguisait son arme comme si elle n’avait jamais été interrompue. Quelques mèches de sa chevelure blanche retombaient devant son visage, finissant de la couper de ce monde qu’elle semblait avoir déjà oublié. Être ainsi ignoré avait quelque chose d’un peu vexant, sur le principe, mais n’était pas foncièrement dérangeant. Adelmiro recherchait sa présence dissuasive, pas sa conversation. Attendant patiemment qu’elle revienne vers lui, il contempla ses bras et les tatouages qui les recouvraient. De ce qu’il pouvait voir, tous représentaient des animaux, certains assez étonnants. Des modèles inattendus, sur quelqu’un dont le métier est de manier les armes, se dit le ministre, mais ce n’était pas vraiment un jugement. Qu’elle affiche ainsi son centre d’intérêt, si éloigné de son métier, était surtout, à ses yeux, une preuve de courage qu’il ne pouvait qu’admirer.

    Il était en train d’essayer d’identifier la bête juste au-dessus de son coude quand le corps de sa voisine s’immobilisa soudain. La mercenaire se retourna alors vers lui comme si elle se réveillait d’un rêve. Son excuse sonna tout à fait sincère, tout comme sa réponse négative à sa proposition.

    - Je me nomme Yul. Mercenaire. Enchantée de faire votre connaissance.

    Face à une femme naidienne, Adelmiro se serait relevé puis incliné sur cette main tendue pour y déposer un baisemain mais dans cette situation, cette idée ne l’effleura même pas. Il serra la paume offerte, avec même un peu plus de fermeté qu’il n’en aurait fait preuve face à un homme de son peuple. Le cadre lui paraissait propice à un salut viril plutôt que de pure courtoisie.

    - Mon nom est Adelmiro Ybaria. Je suis ministre à la cour de la reine Lilz, du royaume Naidii.

    Il hésita une seconde à dévoiler la raison de sa présence puis jugea qu’il valait mieux ne pas laisser la moindre ambiguïté.

    - Je me rends à Ushi pour assister aux célébrations des fêtes d’Umemizu, sur l’invitation de la généralissime Shui, expliqua-t-il.

    C’était la version courte de l’histoire. La longue impliquait des discussions interminables, si enflammées que le ministre sentait pointer la migraine rien qu’en s’en souvenant. Il préférait ne plus y penser. Plus moyen d’y changer quoi que ce soit, de toute façon.

    Soucieux de changer de sujet, il désigna du doigt la lame arrondie dont la mercenaire prenait tant soin.

    - Je n’ai jamais vu une arme comme cela, dit-il avec légèreté.
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    Yul La'nfan
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    Lun 13 Nov - 22:26

    Le charme des armes

    ft. Adel


    La poigne de l’étranger fut plus vigoureuse qu’elle ne l’aurait imaginé, et Yul esquissa un sourire en coin à l’idée qu’il ait pu se sentir menacé dans sa virilité. Si cet homme n’était effectivement pas d’ici, peut-être son honneur avait-il pris un coup cuisant d’avoir été ainsi défendu par une femme.
    - Mon nom est Adelmiro Ybaria. Je suis ministre à la cour de la reine Lilz, du royaume Naidii.
    Sous le choc, les yeux de Yul s’écarquillèrent et ses sourcils se haussèrent. Elle se dépêcha de camoufler sa réaction en reprenant son travail sur son arakh, mais dans sa tête, tout était chamboulé. Elle se sentait soudainement intimidée de se retrouver face à une personne si importante. Elle l’avait pensé noble, au vu de ses apparats, mais jamais elle ne se serait doutée qu’il était ministre d’un gouvernement étranger. Elle se tança plusieurs fois mentalement pour son comportement inapproprié, mais il n’avait pas l’air de lui en valoir, ce qui la rassura ne serait-ce qu’un peu.
    Il était saugrenu, presque étrange, d’imaginer qu’un homme de son peuple qui aurait été si souvent dégradé en tous points puisse être, dans un autre royaume, à la tête d’un gouvernement. L’idée la fascinait tout autant qu’elle la dérangeait, et elle se prit à le scruter de nouveau, imaginant les conflits auxquels il avait dû faire face pour en arriver là où il était aujourd’hui.
    Elle était si habituée à l’apparente docilité des hommes de son peuple que rencontrer quelqu’un comme Adelmiro, avec des traits Qiang mais une personnalité qui devait être diamétralement opposée à celle d’une personne comme son père, avait le mérite de l’intriguer au plus haut point.
    Lorsqu’il expliqua la raison de sa venue, Yul acquiesça. Elle avait entendu parler des célébrations qui auraient bientôt lieu et, si elle ne s’y rendrait pas elle-même, elle comprenait pourquoi un dignitaire Naidien avait toutes les raisons de s’y trouver. Même si elle ne pouvait qu’appréhender les regards et les rumeurs auxquelles il allait s’en doute devoir faire face, une fois le peuple le voyant sur une estrade.
    Elle considéra un instant évoquer sa propre raison de se trouver en ces lieux ce soir, mais se ravisa. Yul n’était pas connue pour être une grande bavarde, et elle avait peur d’ennuyer le ministre. S’il souhaitait en savoir plus, nul doute qu’il poserait la question.
    - Je n’ai jamais vu une arme comme celle-ci.
    Il pointait son arakh du doigt, et Yul haussa un sourcil étonné. Ce n’était certes pas une arme traditionnelle Qiang, mais ce ministre avait dû voyager, n’est-ce pas ? Etait-ce vraiment la première fois qu’il en voyait un ?
    - Il s’agit d’un arakh, finit-elle par dire, pas peu fière d’afficher son arme, la poussant même vers Adelmiro pour qu’il puisse l’observer de plus près. Une arme Nakhti. Le tranchant est très aiguisé, faites attention de ne pas vous couper.
    Yul prenait grand soin de ses armes. Elles conditionnaient tout autant sa survie que sa paie, et elles l’avaient accompagnées pendant si longtemps qu’elles faisaient comme partie intégrante de son être. L’arakh était arrivé quelque peu après la lance, des soldats Nakhta ayant été conviés à Tadala pour les entraîner durant une courte période de temps. Elle avait vu ces hommes s’en servir avec une dextérité déconcertante, découpant des pastèques en deux comme s’il s’agissait de petit beurre, jonglant avec comme s’ils ne risquaient pas de perdre une main dans l’histoire. Quelques instants plus tard, et elle en commandait un à l’un des forgerons du secteur. S’il avait quelques peu souffert depuis, notamment durant la grande guerre, elle en prenait toujours soin comme de la prunelle de ses yeux. Elle sourit, en repensant à toutes ces années passées depuis, bien que dans sa bouche, l’arrière-goût amer du sang des multiples victimes qu’elle avait tuées avec cet arakh menaçait de la ramener à de plus sombres souvenirs.



    Adelmiro Ybaria
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    Mar 21 Nov - 21:24

    Une étape mouvementée

    Si Adelmiro avait craint la réaction de la mercenaire à l’annonce de son nom et de son rang, ses peurs furent vite étouffées. Elle avait bien laissé transparaître une pointe de surprise (il ne pouvait pas en demander moins) mais celle-ci s’était vite changée en un intérêt qu'il avait jugé sain, flatteur mais pas intimidant, juste de quoi nourrir sa fierté. Il en profita comme on profite d’un rayon de soleil qui transperce, pour un instant seulement, un épais brouillard d’hiver. Il s’attendait à ce que son orgueil soit mise à mal, une fois à Ushi.

    Comme pour boucler la boucle, après cet intérêt revient la surprise. Une autre, qu’Adelmiro avait plus ou moins sciemment provoquée. Elle n’avait plus rien d’admiratif, cette fois, mais si une partie de lui le remarqua, elle n’y prêta pas attention. Le brouillard s’était refermé, mais c’était mieux que de prendre le risque de voir où la discussion allait mener si on continuait. Les armes, un sujet pour lequel Adelmiro n’avait jamais eu le moindre intérêt, étaient un thème qui semblait à peu près sûr.

    En réalité, il s’annonçait même réellement intéressant. Ainsi, une mercenaire qiang portait une arme nakhti ? Il ne releva pas la pointe de condescendance, peut-être involontaire, du dernier conseil, déjà fasciné par la courbe de cette étrangeté. Il eut un court mouvement de recul quand il la vit glisser sur le plateau de la table, poussée par la mercenaire, puis s’arrêter juste devant lui. Il n’avait jamais rien tenu de plus aiguisé qu’un couteau à viande : pourquoi prendre le risque de se blesser quand on a constamment, quelques pas derrière soi, un garde du corps endurci ? Il ne put cependant résister à l’éclat impeccable de l’arme et il se saisit avec précautions du manche.

    Le cuir, sous sa peau délicate, était doux, tanné par une poigne ferme et récurrente. Il anticipait avec un peu d’appréhension le poids de la lame mais il était si bien équilibré qu’il souleva le tout avec une facilité qui le déconcerta. Après des premières secondes très prudentes, il s’enhardit un peu et manipula l’arakh avec plus d’assurance. Il l’approcha de lui, le retourna, le soupesa. D’un pouce prudent, il en apprécia le fil. Il retira bien vite son doigt : la jeune femme ne lui avait pas menti.

    - Une arme très intéressante, jugea-t-il avec sincérité en la reposant. Alors elle vient du désert ? Je suppose que vous y êtes allée, alors. Les Nakhti sont-ils vraiment aussi… aussi… « pensants »…
    Il avait prononcé ce dernier mot avec beaucoup d’hésitation avec un manque d’entrain sans doute évident. Mais à l’instant critique, il s’était rendu compte qu’il ne savait pas dire « philosophes » en langue qiang.

    - Sont-ils aussi pensants qu’on le dit ? Je le crois difficilement, puisque c’est aussi un peuple avec des gens très violents.

    Une phrase sans aucun style et d’une lourdeur désespérante mais on ne peut pêcher qu’avec les appâts qu’on a. Avec un peu de chance, son interlocutrice n’aurait pas l’éducation pour vraiment le remarquer et lui en tenir rigueur. Tenir son rang, en tous points, était toujours une de ses priorités, même en territoire étranger, au fond d’une auberge de campagne, au milieu et en face de personnes qu’il ne reverrait probablement jamais. Question de principe. Et de fierté.

    - En tout cas, cette arme est magnifique.

    Une phrase sans intérêt. D’aucuns auraient dit que sa sincérité la rendait justement plus intéressante que n’importe quel mensonge mais d’un point de vue rhétorique ou à l’échelle de la conversation, elle était prononcée au pire moment, juste après une question, et n’appelait à priori aucune réaction, en tout cas aucune sur laquelle il pourrait rebondir. D’un autre côté, flatter un peu sa sauveuse ne pouvait être qu’utile. Après tout, Tibur n’était toujours pas revenu.
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    Barrière de langage

    ft. Adel


    Adelmiro observa l’arme avec un œil qui, s’il n’avait rien d’expert, semblait néanmoins fasciné par la lame entre ses mains. Il osa même un ou deux tours de poignets pour tester l’équilibre de l’arakh, et Yul sourit face à sa mine légèrement surprise. Son regard fut cependant rapidement happé par les airs désapprobateurs du reste des clients Qiang, pour lesquels cet homme de leur peuple jouant de l’arme était un sacrilège. Elle envoya tout un chacun vaquer à ses occupations en les fusillant tour à tour du regard, puis revint vers le ministre.
    Celui-ci passait son pouce sur le fil de la lame. Yul roula des yeux. Apparemment, sa mise en garde n’avait pas été suffisante. Mais lorsqu’il retira sa main de l’arme avec rapidité, il n’y avait qu’une simple trace rosâtre qui s’y détachait. Pas d’effusions de sang, au moins.
    L’étranger évoqua alors la provenance de l’arme. Ses mots se firent plus hachés, plus hésitants.
    - Sont-ils aussi pensants qu’on le dit ? Je le crois difficilement, puisque c’est aussi un peuple avec des gens très violents, dit-il.
    Yul ne put retenir un rire, qu’elle essaya de camoufler tant bien que mal derrière la paume de sa main. Si ce genre de discours hasardeux pouvait passer auprès des paysans, ce n’était clairement pas le cas d’une soldate de Kokora éduquée, et encore moins de Yul, dont la mère, administratrice à Penden, avait assuré un enseignement presque irréprochable en la matière.
    - Vous paraissez bien rouillé, avoua-t-elle finalement, le rire pas totalement dissipé de son ton. Je vous suggère de vous entraîner un peu plus si par hasard vous étiez convié à faire un quelconque discours à Ushi, vous risqueriez plus que mon simple amusement sinon.
    Elle laissa le silence se faire pour une seconde ou deux, puis reprit :
    - Mais pour vous répondre, oui, je suis effectivement allée en Royaume Nakhti à de nombreuses reprises. J’accompagne souvent des convois pour Tadala. Ne vous fiez pas trop aux rumeurs qui courent à propos d’eux ; si les nomades ont effectivement parfois quelques tendances à l’affrontement, les sédentaires sont bien plus pacifiques, et recèlent de connaissances qui devraient, j’en suis presque sûre, vous intéresser.
    Elle reprit son arakh tout en continuant :
    - Quant à leurs croyances, elles sont tout aussi légitimes que les nôtres. Peut-être plus, puisqu’elles les poussent sans cesse en direction d’une amélioration de leur personne.
    Elle releva les yeux vers Adelmiro, qui semblait l’écouter avec intérêt. Elle rougit néanmoins face à l’attention, soudain honteuse de s’être autant laissée aller dans son discours, d’autant plus face à un dignitaire étranger. Elle n’était jamais très à l’aise face à des inconnus, ce qui se confirmait encore et toujours. Peut-être ne lui en tiendrait-il pas rigueur.
    D’ailleurs, lorsqu’elle s’intéressa de nouveau à l’homme, il était en train de darder son regard sur la porte menant à l’extérieur. Attendait-il quelqu’un ? Un garde du corps, sans doute. Il était peu probable que quelqu’un d’aussi important voyage seul.
    Embarrassée de s’être laissée allée à tant de véhémence, Yul resta silencieuse, ses doigts tapotant machinalement le plat de son arakh.  


    Adelmiro Ybaria
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    Une étape mouvementée

    S’il y a bien une chose qu’Adelmiro déteste, c’est qu’on se moque de lui. Aussi, le rire de la mercenaire le vexa profondément. Qu’elle essaie vaguement de le cacher au lieu de lui envoyer en pleine face n’avait que peu d’importance.

    - Vous paraissez bien…

    Il ne connaissait pas le mot suivant mais il se doutait que ce n’était pas un compliment. Le ton de la Qiang, encore un peu amusé, n’évoquait pas une véritable insulte mais ne pouvait-ce être qu’une simple constatation, parfaitement neutre ? Ç’eut été étonnant. Adelmiro décida néanmoins d’accueillir le conseil qui suivit avec un sourire poli, vaguement reconnaissant. Non, il n’était pas prévu qu’il fasse le moindre discours. Prévoyant, le ministre avait travaillé une phrase d’excuse au cas où on lui faisait cette demande mais il aurait été très étonné de devoir s’en servir. La Généralissime Shui avait fait venir un officiel naidien pour lui faire montre de toute la magnificence des cérémonies qiang, démontrer leur propre goût et leurs propres richesses, pas pour le montrer lui à ses concitoyens. Et même si elle avait cette intention, Adelmiro était persuadé qu’elle changerait d’avis dès la seconde où elle verrait le pied-de-nez vivant qu’on lui avait envoyé.

    - Mais pour vous répondre… reprit la mercenaire.

    Son témoignage était intéressant : il confirmait ce qu’Adelmiro avait entendu dire mais était de première main, plutôt que des histoires transmises de voyageurs en marchands. Il fut un peu choqué d’entendre dire que leurs croyances étaient peut-être plus légitimes que les siennes mais il n’exprima pas son offuscation à haute voix. Après tout, que vaut le jugement d’une mécréante sur une autre foi impie ? Et ce n’était pas le moment de lancer ce débat. Pas le moment, et surtout pas l’endroit.

    De nouveau, son regard dévia vers la porte. Toujours résolument close. Il soupira. Non pas que la jeune femme soit de mauvaise compagnie, mais il avait des jours et des jours de voyage dans les jambes et il ne rêvait que d’aller se coucher. Oubliant un instant les convenances de la cour, il s’agita sur sa chaise, essayant de détasser le bas de son dos et d’étirer ses épaules tendues. Un peu plus à l’aise, il laissa tomber sa tête en arrière et ferma les yeux. Une fois passée la frayeur de cette confrontation, son corps se laissait aller.

    Le bruit d’une bûche qui tombe dans l’âtre le tira soudain de sa rêverie. S’était-il assoupi ? Difficile à dire. Si c’était le cas, c’était bien impoli envers sa compagne de table.

    - Je suis désolé, s’excusa-t-il en se redressant. Mon voyage a déjà été long et n’est pas terminé. Vous devez être vous aussi de passage, non ? Peut-être en mission d’escorte ?

    Pour ne pas se rendormir, il devait parler, dire n’importe quoi. Et ce village lui paraissait trop éloigné de quoi que ce soit pour que la mercenaire ait pu trouver un emploi par ici. De ce qu’il savait, les campagnes qiang étaient sûres.
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    Ven 15 Déc - 0:03

    Interlude

    ft. Adel


    Lorsque Yul releva la tête vers le ministre, elle constata que celui-ci se dandinait sur sa chaise, tentant tant bien que mal de s’étirer, peu à l’aise. Il était bien loin de la bienséance et du maintien dont il avait fait preuve jusqu’ici. Courbatu, sans nul doute. Yul ne se rappelait que trop bien de la brûlure cuisante de ses membres après ses premiers longs voyages, malgré les nombreuses années qui s’étaient écoulées depuis. Elle ne lui en tint donc pas rigueur.
    L’auberge se vidait petit à petit, la nuit avançant à pas de velours, la fatigue venant cueillir les plus faibles d’entre eux. Mais parmi les clients restés attablés, certains continuaient de jeter de tant à autre des regards hargneux au ministre. Yul en profita pour bomber le torse, le port de tête haut. Si quiconque tenait à se frotter à l’étranger, elle serait plus qu’heureuse de se joindre au débat. Cela faisait trop longtemps qu’elle n’avait pas pu se servir de ses armes.
    Adelmiro avait laissé sa tête partir en arrière, ses paupières closes. Sûrement éreinté par ses épopées. Yul en profita pour reprendre ses activités précédentes, polissant ses armes, resserrant les lanières de cuir qui lui servaient de prises sur le manche de sa hallebarde. Laissant l’étranger assoupit à son repos bien mérité. Elle en avait presque terminé de ses taches lorsqu’il fut secoué hors de sa torpeur, les yeux écarquillés de stupeur, sans doute de s’être ainsi laissé aller.
    Il s’excusa, ce à quoi elle répondit par un simple hochement de tête. Puis s’enquit de sa propre présence ici. Son ton était détaché, et Yul le soupçonna de ne demander que pour passer le temps. Mais elle n’avait pas grand-chose de mieux à faire, et son esprit chevaleresque la sommait de rester à ses côtés tant qu’elle ne pouvait être sûre qu’il serait en sécurité. Elle indulgea donc la question du ministre :
    - Je ne suis pas encore officiellement en mission, mais je suis effectivement en train d’essayer de rejoindre un convoi, dit-elle, regard focalisé sur son nettoyage, un chiffon sorti d’une de ses poches à la main.
    Le silence se fit quelques instants. Elle s’interrogea quant au fait de poursuivre ou non, mais fini par s’en convaincre. Après tout le ministre aurait tout oublié dès demain matin, et elle n’avait rien de particulier à cacher. Elle n’était même pas sûre qu’il l’écoutait vraiment.
    - Il y a un marchand en particulier, que j’escorte. Un vendeur d’animaux. Cette fois, nous avons une livraison à effectuer dans l’Empire. Je le rejoins donc à la frontière, et je l’accompagnerai sur le reste du trajet, ainsi qu’au retour. Peut-être aurons-nous des détours à faire, entre temps. Je suis pratiquement en contrat à plein temps, avec lui.
    Yul se tut. Elle ne savait qu’ajouter de plus.




    Adelmiro Ybaria
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    Sam 3 Fév - 12:53

    Une étape mouvementée

    Adelmiro écouta poliment la réponse de la mercenaire. Il devait reconnaître qu’elle ne l’intéressait à priori pas tant que ça mais il voulait se montrer poli. Étrange comme, rien qu’en sortant du cadre de la cour royale, il avait perdu cette capacité à écouter d’une oreille hypocrite, qui pouvait ne sélectionner que les points intéressants ou pouvant permettre de poursuive la conversation. Cela avait cependant quelque chose de reposant. Comme un vêtement un peu trop lourd ou trop ajusté : on aime se pavaner avec et ce n’est qu’en l’enlevant qu’on se rend compte d’à quel point il nous pesait.

    Avec un peu de concentration, il aurait tout de même pu enchaîner sur la même lancée. Les animaux, voilà un sujet de conversation inhabituel pour lui, citadin, et donc potentiellement instructif. Sauf que ce soir-là, sa concentration et sa curiosité habituelle étaient quelque peu émoussés. Aussi, dès que la mercenaire eut fini sa tirade laconique, quand Adelmiro chercha un point sur lequel rebondir, il se retrouva face à un grand blanc, un vide abyssal. N’avait-il rien retenu de ces quelques phrases ? En tout cas, rien qui enclanchât la moindre répartie…

    - Ce doit être très intéressant, finit par lâcher le ministre.

    Et il détourna les yeux, embarrassé par sa propre vacuité.

    Ce faisant, son regard tomba accidentellement sur un groupe de femmes le dévisageant à la dérobée. Même soulignés par les ombres que projetaient les trop rares lanternes de la salle, leurs visages n’étaient pas menaçants, ils dénotaient seulement la curiosité méfiante qu’Adelmiro avait eu à affronter depuis son entrée sur le territoire, mais après sa mésaventure de ce soir-là, sa confiance en sa prestance naturelle et en son escorte ne suffisait plus à l’ignorer.

    - Pensez-vous qu’il vaudrait mieux pour moi être accompagné d’une escorte de Qiang plutôt que de Naidiens ? demanda-t-il en se retournant vers la mercenaire. Il ne me reste que quelques jours de voyage mais je vais rencontrer de plus en plus de monde, cela pourrait m’aider à me fondre dans le paysage, non ?

    Durant les préparatifs, il avait brièvement envisagé de faire appel, dès son départ ou à son entrée en terre qiang, à quelques mercenaires natives. Après tout, leur réputation n’était plus à faire, et bien des marchands se rendant dans l’Ouest avaient recours à leurs services. Il avait finalement écarté cette possibilité. Cela lui semblait être une question d’honneur. Il ne voulait pas laisser entendre que les soldats naidiens n’étaient pas capables d’assurer la protection d’un seul homme en territoire étranger. Il se rendait compte, à présent, que l’honneur est un bien faible bouclier. Si des gens pouvaient nourrir de mauvaises intentions face à sa personne, que ce soit contre ses origines, son rang ou même son corps, ils ne reculeraient pas pour préserver sa petite fierté d’aristocrate.
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    Ven 9 Fév - 19:05

    Défaillance

    ft. Adel


    La suspicion de Yul se confirma lorsque le ministre balbutia quelques mots laconiques en réponse à sa tirade. Sans en prendre ombrage, Yul continua ses affaires, ralentissant sciemment ses gestes pour être certaine de ne pas se retrouver les mains vides en face du ministre tout autant que pour lui laisser le loisir de rassembler ses idées, s’il venait de nouveau à parler.
    Et parler, il le fit :
    - Pensez-vous qu’il vaudrait mieux pour moi être accompagné d’une escorte de Qiang plutôt que de Naidiens ? Il ne me reste que quelques jours de voyage mais je vais rencontrer de plus en plus de monde, cela pourrait m’aider à me fondre dans le paysage, non ?
    Yul fut un instant prise au dépourvu par la question. Ses mouvements réguliers cessèrent, avant de reprendre, toujours en cadence. Puis, un sourire au coin des lèvres, elle répondit :
    - Et vous, pensez-vous que votre escorte est si mauvaise pour ainsi ressentir le besoin de demander l’aide de mes collègues ?
    Une pause. Les yeux de Yul s’écarquillèrent, ses joues rosirent, et elle détourna le regard, penchant la tête en signe d’excuses, consciente d’avoir probablement manqué de respect au ministre et à ses subordonnés. Elle s’empressa d’ajouter :
    - Pourquoi vous fondre ainsi dans la masse ? Vous êtes un Naidien, et venez à Ushi en cette qualité. Prendre une escorte de chez nous ne vous ferait pas forcément mieux voir du peuple auquel vous devez vos origines. Je sais qu’en tout cas, si j’étais à votre place, ma fierté en souffrirait. Et je n’ai aucun doute que les combattants dont vous vous êtes entourés n’auront pas de mal à dérouter les quelques bandits de grand chemin qui souhaiteraient vous détrousser.
    Il y eut de nouveau un instant de silence, durant lequel Yul se força à prendre une inspiration et à fermer les paupières. A réguler le maelstrom de ses pensées en un flot cohérent d’idées, et à peser le pour et le contre, pour ne pas lâcher de mots qu’elle pourrait plus tard regretter.
    - Et ne craignez pas que nos guerrières pensent à une quelconque invasion, enchaîna-t-elle, sourire amusé revenu. Elles sont bien trop conscientes de leur force pour ne pas se sentir menacées par quelques Naidiens, et bien trop malignes pour ne pas risquer un incident diplomatique, quand le saké ne leur monte pas à la tête. Vous ne risquez rien de leur part si vous ne vous arrêtez pas dans une taverne un soir de ripaille.




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    Jeu 15 Fév - 19:14

    Une étape mouvementée

    Peut-être pour la première fois depuis le début de cette discussion, Adelmiro avait posé une question sérieuse. Ses interrogations sur l’arme de la mercenaire et sur les Nakhti étaient certes nées d’une curiosité sincère mais elles avaient avant tout pour but de justifier sa présence à cette table, de façon à peine plus subtile que le reste de sa conversation. Aussi, il espérait une réponse tout aussi sérieuse.

    Il connaissait la tactique qui consistait à répondre à une question par une autre. Une façon diplomate d’éviter à la fois le mensonge et un refus trop frontal de répondre. Du moins, ce pouvait l’être, parce que cette fois-là, ce n’était pas la diplomatie qui étouffait la mercenaire. Elle aurait pu se passer du sous-entendu quant à la valeur de l’escorte d’Adelmiro, qui vexa le ministre. Elle n’avait pas compris, visiblement. Il parlait de se fondre dans le paysage, pas de compenser un manque d’efficacité. Il réfréna l’envie de répliquer immédiatement et se contenta de jeter à la Qiang indélicate un regard fâché.

    Grâce à cette remontrance silencieuse ou parce qu’elle réalisa elle-même qu’elle avait parlé avant de réfléchir, la mercenaire modéra sa première réponse. Le visage du Naidien se détendit légèrement mais il garda une expression concentrée. Il se permit seulement un petit sourire quand son interlocutrice retrouva le sien. Ce qu’il entendait ne lui plaisait pourtant pas plus que ça. Il n’était toujours pas sûr qu’elle ait bien compris ce qu’il voulait dire.

    - Mon escorte est bien entraînée et je suis fier d’elle, assura-t-il. Je sais qu’elle se débarrassera sans peine de bandits, au besoin. Mais ce ne sont pas eux que je crains. Ce soir, j’ai pris conscience que j’attirais sans doute trop l’attention et les… fâchages contre moi.

    Tant pis si « fâchage » n’existait pas, ce devait être compréhensible.

    - Après tout, je suis tout ce que beaucoup de Qiang méprisent : un homme, de pouvoir en plus, qui sert un pays ennemie autre que celui de ses origines. On peut facilement me prendre pour un expatrié qui a choisi de se mettre aux services d’ennemis. Face à cela, je ne suis pas certain que toutes se préoccupent de la diplomatie. Ce n’est pas écrit sur mon front que je suis en voyage officiel. Et puis, je ne croiserai sans doute pas que des personnes sobres.

    « Je n’attendrais donc pas d’une escorte de Qiang une véritable protection physique, plutôt une preuve de… enfin, que ma présence ici est acceptable. Vous voyez ce que je veux dire ? Vous ne pensez pas que ça découragerait mieux vos compatriotes qui pourraient vouloir remettre un homme étranger à sa place ?

    En fait, avec cette logique, le mieux aurait même été deux ou trois soldates officielles. Mais la Généralissime ne l’ayant pas spontanément proposé, les quémander aurait été bien trop humiliant. Quelques mercenaires présentant bien pourraient faire l’affaire. Quoiqu’il était curieux de savoir si une indigène confirmait sa vision de ce peuple fier et un peu trop belliqueux.
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    Dim 25 Fév - 16:28

    Une histoire de fierté

    ft. Adel


    Le visage d’Aldemiro vit passer plusieurs expressions, tantôt fâché, tantôt fermé. Il semblait que les réponses apportées par Yul ne lui convenaient pas. L’importunaient, peut-être. Elle en vint à se demander si elle n’avait pas méjugé ses paroles, et attendit les clarifications qui, elle le sentait, viendraient bien assez tôt.
    Elle se força à ne pas sourire un peu plus tandis qu’il cherchait ses mots, en inventant mêmes certains qui, bien qu’ils permettaient de comprendre son message, auraient plutôt appartenus à la bouche d’un enfant qu’à celle d’un ministre distingué.
    Lorsqu’il eut fini sa tirade, Yul prit soin de délibérer, pour ne pas l’offenser plus avant. Elle pensait comprendre où le ministre voulait en venir, même si en tant que soldate, l’idée d’attaquer une autre personne pour des raisons aussi stupide que son pays d’appartenance ne lui traverserait jamais l’esprit. Elle se savait, si non une exception, une minorité parmi ses consœurs. Fait que la soirée s’évertuait à lui rappeler. Mais elle connaissait l’honneur de son peuple, et leur fierté. Elle ne pouvait laisser cet étranger se méprendre ainsi.
    - Vous me trouverez sans doute trop directe. Mais ma fierté, et, j’ose le dire, la votre sans doute aussi, ne saurait souffrir de devoir ainsi employer des mercenaires seulement pour faire belle figure face à quelque embûche. Les gens d’ici ne sont pas stupides. Personne ne souhaite démarrer une nouvelle guerre. Votre poste n’est pas marqué sur votre front, mais il l’est dans votre allure, dans vos vêtements, dans votre parler, et dans la garde qui vous accompagne. Les soldates y réfléchiront à deux fois, avant de vous attaquer. Sauf si, comme ce soir, vous faites l’erreur de vous trouvez seul, tard, dans une salle emplie de mercenaires désabusées.
    Elle reprit son souffle. Mesura ses mots, encore une fois, et encore une fois, choisit l’honnêteté :
    - C’est à vous de déterminer si votre présence ici est acceptable ou non. Si vous ne le pensez pas vous-même, comment voulez-vous être pris au sérieux par un peuple qui, selon vos propres mots, pense que vous l’avez renié ?
    Un instant de silence. Puis :
    - Si malgré tout ça, vous estimez ne pas être en sécurité, ce qui, je suppose, est votre droit, alors je serai ouverte à vous faire des recommandations quant aux personnes qui pourraient vous accompagner durant votre séjour.
    Puis, avec une pointe d’ironie, mais aussi pour soulager l’atmosphère tendue qui s’était installée entre eux, elle ajouta :
    - Je vous conseillerai d’abord d’éviter les dames que nous avons croisées il y a peu. Apparemment, elles ont le saké mauvais.



    Adelmiro Ybaria
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    Sam 5 Mai - 14:18

    Une étape mouvementée

    Adelmiro fut soulagé de voir que, cette fois, la mercenaire réfléchit longuement avant de lui répondre. Cela ne présageait pas de s’il aimerait ou non ce qu’elle trouverait à lui dire mais au moins, il échapperait sans doute aux malentendus stupides et aux jugements trop hâtifs. Et en effet, le ministre n’eut pas à reprocher à son interlocutrice la forme de sa réponse, même s’il était loin d’être convaincu par certains de ses propos. Personne ne souhaitait une nouvelle guerre ? Il s’attendait plutôt à ce que cet armistice, intervenant alors que les Occidentales reprenaient le dessus dans ce conflit, ait été accueilli comme une preuve de faiblesse. Mais il reconnaissait que pour en venir à cette impression, il prêtait beaucoup aux Qiang les sentiments que les Ivrians auraient sans doute ressenti dans la même situation. Après tout, il n’avait aucun moyen de connaître directement les impressions des premières concernées. Il n’avait abordé ce sujet avec sa mère que sous l’angle des retombées internationales, sans penser à questionner Hei sur ses ressentis en tant que Qiang : lui-même ne la considérait plus que comme une Naidienne, d’adoption certes mais à l’intégration parfaitement réussie, au moins de son côté à elle. Des deux autres Qiang présentes dans son entourage, il n’avait osé aborder le sujet avec aucune des deux : ni avec l’ambassadrice qiang à Talehe, qui se montrait très froide avec lui, ni avec Hua Bao Xia, avec qui la conversation avait pris une toute autre direction, ce qui n’était pas pour lui déplaire. Mais là non plus, il n’avait pas envie de lancer le débat. C’était une toute autre question qui les intéressait pour le moment.

    Il passa aussi sur le reproche à peine déguisé qui le rendait en partie responsable de ce qui lui était arrivé. Il n’avait nullement cherché le conflit, avait même tout fait pour rester discret, la faute échouait uniquement à celle venue le provoquer. Sauf que même si rester humble, autant que sa fierté le permettait, ne le protégeait pas des ennuis, qu’est-ce qui le pourrait ? D’après elle, il devait simplement fuir les situations trop dangereuses ? Elle avait pourtant bien identifié sa fierté – heureusement, parce qu’il ne fallait pas être prophète pour la remarquer et que passer à côté aurait été preuve d’un manque certain de sens de l’observation. Que malgré cela son principal conseil soit de faire profil bas l’irrita.

    Mis à fleur de peau par la fatigue, cette vexation prit vite une ampleur exagérée. Il pinça les lèvres en une moue boudeuse pour écouter la suite de la tirade mais il n’était déjà plus objectif. En d’autres circonstances, les propos de la mercenaire auraient pu l’intéresser et donner lieu à un débat intelligent mais ce soir-là, il avait surtout envie qu’on lui cède et qu’elle abonde dans son sens. Il ne chercha pas à répondre à sa question, qu’il décida rhétorique, et attendit une suite un peu plus sérieuse. Il fut bien déçu. Lui qui aimait tant manier l’ironie face à ses contradicteurs, il se fit prendre comme un débutant à ce qui aurait pu être son propre jeu.

    - Je ne peux interdire pas malheureusement boire aux femmes autres autour de moi, grommela-t-il dans un qiang soudain approximatif. Et même si sobres, elles peuvent faire la différence entre assumage de présence acceptable et fierté placée mal ? Mais j’ai comprendre votre point de vue. Et je crois comprendre aussi que si j’essaie recruter mercenaires autres pour cette raison, elles ne seront convaincues pas de leur nécessité et risqueront donc de faire leur travail mal. Tant pis. Je garderai ma garde plus près de moi et me déplacerai comme si je me méfie de ce peuple. C’est dommage.

    Il se leva avec raideur, contracté par l’épuisement physique et moral et par la vague conscience d’avoir été un peu trop dur avec une interlocutrice qui l’avait sorti d’un bien mauvais pas et qui n’avait fait que répondre sincèrement à ses interrogations. Il hésitait à s’excuser et à reprendre ses justifications mais Tibur choisit justement ce moment-là pour refaire son apparition. Adelmiro reconnut son pas lourd s’approcher derrière lui et l’image d’un lit, plus ou moins douillet mais cela lui ne lui importait plus vraiment, se fit plus précise que jamais. Aussi, il décida qu’il était grand temps de mettre fin à cette discussion dont l’issue pourrait difficilement être plus détendue.

    - Quoi qu’il en soit, je vous remercie grandement pour votre intervention, dit-il lentement, d’un ton plus doux et dans un qiang soigné, tout en s’inclinant, une main sur le cœur. Ainsi que pour vos conseils. Si jamais vous venez à Talehe, n’hésitez pas à invoquer mon nom pour avoir des entrées sur la rive gauche.

    Et après un dernier salut, il s’en alla d’un pas traînant. Il se sentait vidé et pas vraiment fier de la tournure de cette discussion. Il savait que ce voyage lui serait plus difficile sur le plan personnel que diplomatique mais il venait d’être confronté plus frontalement qu’il ne s’y attendait. Décidément, le peuple de ses ancêtres était bien compliqué à cerner.
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    Incompatibilité

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    Bien loin de l’effet escompté, la tirade de la mercenaire sembla frustrer d’autant plus son interlocuteur. Il se renfrogna, moue peu amène au visage, corps tendu. Yul ne put empêcher ses propres muscles de se contracter, cessant ses mouvements, observant le ministre d’un œil aux aguets. Elle n’aimait pas la tournure que prenait cette conversation.
    La tirade d’Adelmiro, bien que dans un parler plus qu’approximatif, sut transmettre son insatisfaction. Le poing de Yul se referma avec force autour de la garde de son arme lorsqu’une insulte à peine masquée quant aux capacités de ses compatriotes passa les lèvres de l’homme, plus pour se forcer au calme que comme une réelle menace.
    Il conclut. Yul, essayant de calmer les palpitations de son cœur, relâcha sa poigne et détendit ses épaules. Elle s’apprêtait malgré tout à rétorquer qu’un homme de sa stature se promenant en pays étranger sans se méfier était une preuve d’inconscience, mais l’attention du ministre fut happée par le pas branlant d’un homme s’approchant. Détournant les yeux pour s’enquérir de l’origine du son, le regard de la mercenaire rencontra un homme musculeux, pâle de peau. Un Naidien. Et, au vu de la réaction d’Adelmiro, sans doute son garde du corps.
    Elle n’eut pas le temps de se prononcer que son compagnon pour la soirée s’inclinait et la remerciait, glissant au passage quelques mots qu’elle aurait sans doute trouvés chaleureux, si la teneur de leur conversation précédente avait été tout autre. Elle reconnut bien là le savoir-faire des politiciens, et du s’admettre impressionnée par ce revirement de situation.
    Elle eut à peine un instant pour répondre au salut de l’homme, puis celui-ci, ainsi que l’autre Naidien, s’éclipsèrent. Yul attendit quelques minutes supplémentaires, pianotant sur la lame de son arakh, jetant un regard ennuyé aux clients qui la dévisageaient, avant de monter elle aussi, rejoindre sa chambre, et savourer une bonne nuit de sommeil.  


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